Comment parler de la poésie autrement que par la poésie ? Il y a comme une indécence à gloser plus qu'il ne faut, surtout si le recueil est court et se suffit à lui-même. C'est le cas de Á force d'en découdre, de Mary-Laure Zoss, publié aux éditions le Réalgar.
Dans ces proses à forte intensité poétique, dans une "langue brûlée", elle nous crie son "effroi" d'être au monde, cernée par tous ces murs, dedans dehors, "la vie fracturée de partout", et avec en plus l'impression d'être née "l'âme bossue". Elle a mal à son réel, Mary-Laure Zoss. Pourtant, des rêves l'embarquent. La vie est à réécrire et il reste un peu de lumière dans les murs qu'il faut aller patiemment extraire. Et de toute façon les mots sont là pour en découdre et "faire contrepoids, redresser autant qu'il se peut la voussure".
Extraits :
un jour sur deux, tout au moins, on a le cœur tiré hors, d'un coup la douleur nous envoie par le fond, on attend là, dégrisés, béants sous les hautes fenêtres ; fagotés à la diable, on a passé jupes et tricots feutrés, pantalons trop courts, on se récrie contre la lumière arrêtée dans les murs, dans le plafonnier couleur de nicotine, nos corps ne sont plus qu'étuis à brouillard, papier bible autour d'un froid ; à occuper l'intérieur, on s'éprouve si peu habiles, comme à l'emplir de quoi, songeant creux ; d'un rembourrage de sciure ou de l'attirail des rêves, comment s'y prendre pour la combler, cette misère anfractueuse, si seulement, oui si seulement on pouvait s'y instruire
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quand nos contrées sont du nord, de lierre, de limons jaunâtres ; par les vieilles bornes on se carapate, qui croulent dans les talus, par les débris de ciel envasés sous la ronce, vers les hêtres on tire sur la droite, on feinte, voyez-vous ; les trois quarts du temps pour s'extraire, il faut manœuvrer, conjurer comme on peut l'enlisement, tel est notre lot, d'avoir à se tirer sans répit de terres éventrées, on prend la tangente là où les pluies ravinent les fûts tombés, leurs fractures esquilleuses, on ne laisse pas d'aller plus loin, de se dépêtrer des fanges ; jusqu'au déploiement, au-delà du contour, de l'étendue sans nuages
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Alain Roussel
Mary-Laure Zoss : À force d'en découdre, aux éditions le Réalgar (50 pages,10€)
Dans ces proses à forte intensité poétique, dans une "langue brûlée", elle nous crie son "effroi" d'être au monde, cernée par tous ces murs, dedans dehors, "la vie fracturée de partout", et avec en plus l'impression d'être née "l'âme bossue". Elle a mal à son réel, Mary-Laure Zoss. Pourtant, des rêves l'embarquent. La vie est à réécrire et il reste un peu de lumière dans les murs qu'il faut aller patiemment extraire. Et de toute façon les mots sont là pour en découdre et "faire contrepoids, redresser autant qu'il se peut la voussure".
Extraits :
un jour sur deux, tout au moins, on a le cœur tiré hors, d'un coup la douleur nous envoie par le fond, on attend là, dégrisés, béants sous les hautes fenêtres ; fagotés à la diable, on a passé jupes et tricots feutrés, pantalons trop courts, on se récrie contre la lumière arrêtée dans les murs, dans le plafonnier couleur de nicotine, nos corps ne sont plus qu'étuis à brouillard, papier bible autour d'un froid ; à occuper l'intérieur, on s'éprouve si peu habiles, comme à l'emplir de quoi, songeant creux ; d'un rembourrage de sciure ou de l'attirail des rêves, comment s'y prendre pour la combler, cette misère anfractueuse, si seulement, oui si seulement on pouvait s'y instruire
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quand nos contrées sont du nord, de lierre, de limons jaunâtres ; par les vieilles bornes on se carapate, qui croulent dans les talus, par les débris de ciel envasés sous la ronce, vers les hêtres on tire sur la droite, on feinte, voyez-vous ; les trois quarts du temps pour s'extraire, il faut manœuvrer, conjurer comme on peut l'enlisement, tel est notre lot, d'avoir à se tirer sans répit de terres éventrées, on prend la tangente là où les pluies ravinent les fûts tombés, leurs fractures esquilleuses, on ne laisse pas d'aller plus loin, de se dépêtrer des fanges ; jusqu'au déploiement, au-delà du contour, de l'étendue sans nuages
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Alain Roussel
Mary-Laure Zoss : À force d'en découdre, aux éditions le Réalgar (50 pages,10€)
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